Va te faire Buzzer !

Le buzz, le buzz, le buzz, le mot le plus détestable des média. Depuis qu'ils ont découvert ce mot, toutes les émissions de télé, de radio, tous les journalistes, toutes les maisons de disques, toutes les agences de pubs, bref, tous ceux qui ont un truc à vendre utilisent ce mot à toutes les sauces. C'est un peu comme le jour où "à la mode" a été remplacé par "tendance", ou "vieux truc" par "vintage". Le mot avec lequel on se gargarise à longueur de journaux, de sites internet et de revues de pubs.

Tout le monde recherche le buzz, toute marque veut faire parler de son produit à tout prix, chaque artiste veut qu'on parle de son clip, de son titre avec des petits films censés être bricolés, ou pris au hasard ou fait maison. Tout le monde est prêt aujourd'hui à faire n'importe quoi pour être "le truc qui fait le buzz". Mais au final, pour quel résultat, et de quelle manière ?

Quand on n'a rien de bien à vendre à quoi ça sert de faire parler de soi ? C'est ce que beaucoup de gens oublient, quand derrière la façade le produit ne vaut rien ou la crédibilité est absente, le buzz ne tient pas et surtout ne mène à rien. A part un bon quart d'heure de célébrité gratuite.

Dernier exemple en date, le clip de Make the Girl Dance avec ses filles nues qui descendent la rue Montorgueil. Quelques jours après qu'il soit posté sur le net, tout le monde a repris l'info : "ce clip a été visionné plus d'un million de fois, c'est le buzz du net".

Ok.

Mais est-ce qu'un seul de vos amis , ou une seule émission télé a dit : "regardez le clip de ce génial groupe et écoutez ce très bon titre" ? Non. Pourtant à la base un groupe veut se faire remarquer pour qu'on écoute sa musique, sauf que là c'est juste des filles à poils dans la rue, la musique on s'en fout, tout le monde s'en fout, et aucun média n'a parlé de la musique, tout simplement parce que ce titre est nul et sans intérêt, et ce titre ne sera jamais un tube. Résultat, une fois les filles à poils passées, on n'ira pas acheter le titre, et puis si demain le groupe est sur scène , à moins d'amener le casting de son clip, personne n'en aura rien a faire. "Sex sells" mais seulement quand il y a un truc à vendre.

Même quand on a quelque chose à vendre, le buzz n'y aide pas forcément, tout simplement parce que faire parler de soi, ça ne garantit pas non plus une reconnaissance de la marque. Exemple l'année derniere avec ces vidéos de pop-corn qui eclataient lorsque les grains de mais se trouvaient à coté d'un téléphone portable. Un buzz mondial, très bien. Tout le monde a vu ces vidéos, ensuite on nous a expliqué que c'était une pub déguisée pour une marque d'oreillette Bluetooth...ok, laquelle ? Personne ne le sait, aucun d'entre nous ne pourrait de mémoire citer cette marque. La blague était drôle, mais l'identification de la marque nulle. Et ce genre d'exemple sorti d'agence de com, il y en a des tas.

Aujourd'hui on se sert du buzz sur internet comme d'une formule magique pour vendre du rêve aux marques, un peu comme en 1995 quand on a découvert que mettre des stickers dans la rue était un bon moyen de promo, comme le fait en ce moment Orange qui se fait passer pour un truc de jeune rebelle avec son site de musique en ligne en stickant tout Paris. J'adorerais que les mecs qui sortent des mixtapes de HipHop aillent sticker les vitrines des boutiques Orange, on verrait si ils trouvent le street marketing toujours aussi cool. A se demander si Orange ne fait pas expres de faire un truc moche,uniquement pour faire parler en bien ou en mal, vu que de toutes façons personne ne parle de leur plateforme wormee. C'est comme un constat d'echec : "notre produit n'est pas assez bon, la communication ne fonctionne pas, donc faisons quelque chose de moche et d'outrancier pour faire parler".
Ok ca fait parler, la preuve j'en parle, mais apres ? Qu'ils changent déjà de nom et de logo, apres on en reparlera de la com wormee.

Pour en revenir au Buzz sur le net, ça commence quand même à se voir que des blagues sur Youtube filmées au camescope ne font pas forcément vendre, ni même connaitre le produit.

Et puis cette recherche de buzz, malgré ce que l'on pense, nuit gravement à la créativité. Franchement c'est toujours la même recette qui fait rester les gens devant une vidéo : la bonne blague moqueuse, le sexe, le surnaturel. On a vite fait de ficeler un scénario pour faire parler de sa marque. 

Je ne comprends même pas pourquoi les marques vont voir des agences de pubs pour ce genre de productions. Si Nike demain se paie n'importe quel chanteur ou acteur connu et qu'on le filme au camescope au coin d'une rue en train de se faire mettre en coup de pied dans les parties par un type chaussant des Nike, et bien on est sûr d'avoir la vidéo de youtube la plus vue de la semaine. Le truc salace, la mauvaise blague , le mauvais goût et voilà. Ca marche à tous les coups...un peu comme des filles à poils dans la rue, que ce soit pour un clip ou pour vendre des machines à laver ou de la crème solaire, ça sera tout aussi vu...mais acheté, pas sur. Vous avez acheté l'album de Paris Hilton apres sa sex tape ? 

Faire parler de soi au final c'est très simple aujourd'hui, mais faire vendre est toujours aussi compliqué, et il ne faut pas confondre l'un et l'autre, et surtout l'un n'est pas égal à l'autre. L'équation est très très rare aux vues de tous les trucs "qui font le buzz" qu'on nous balance toute la journée.

Même l'exemple Susan Boyle relève du pathétique. On nous la joue "regardez cette femme laide qui charme le jury par cette voix magnifique". Tout est bien orchestré, avec la petite partie où on fait croire qu'elle n'a rien à faire sur le plateau de l'émission et puis d'un seul coup elle chante et le jury semble se dire "non, ce n'est pas vrai, c'est incroyable on ne s'attendait pas à ça..."

Croyez vous vraiment qu'une chaîne de télé mettrait n'importe qui sur une scène d'une émission de prime time, au hasard, sans savoir ce qui va se passer? Bien sur que non, tout est tellement sécurisé, rien n'est laissé au hasard.

Seulement là, ils avaient tous les ingrédients pour faire un conte de fée et le truc a été très bien mis en scène, avec sa dramatique, et le public de se répéter "mais qu'est ce qu'elle fait dans cette émission cette vieille carne ?" et d'un seul coup les gros plan du jury en extase et les violons, bravo.

Ensuite, au final, Susan Boyle, elle chante bien, mais pas plus que d'autres personnes avec un physique moins disgracieux, et des moches qui chantent il y a partout. Sur les milliers de candidats ayant participé à des shows dans le monde, pourquoi elle, et pourquoi jamais d'autres avant ? Simplement parce les producteurs ont fait en sorte que ça se passe maintenant, et pas simplement parce que nous, pauvres téléspectateurs et internautes avons plébiscité Susan Boyle. On n'a rien choisi, on a choisi à notre place. Depuis 10ans de téléréalité, on a dû passer à coté d'un paquet de Susan Boyle, mais là ça tombait bien, le show avait besoin de faire sa pub.

Des Susan, il y en a plein le monde, même au karaoké à coté de chez vous, mais si on ne nous les agite pas sous le nez avec un petit ruban autour, personne ne le remarque. Le quotidien est incapable de créer le buzz, à part vidéogag, l'afro-ninja et les stars de Youtube du début.

Aujourd'hui tout ce qui est buzz est là pour nous faire croire ou acheter, et est scénarisé, mais ce qui est bien, c'est que nous vivons tellement dans un monde de zapping, qu'à peine buzzé, déjà oublié (Michael Vendetta & co par exemple). Le net ne changera pas les fondamentaux, si le produit est nul personne n'achètera sur le buzz. Si l'artiste n'est pas crédible ou qu'il n'a rien à vendre de bien, on n'ira pas.

C'est malheureusment le chien qui pête, la fille a poil, ou ce genre de trucs qui retiendra toujours l'attention des gens, à se demander si on ne cherche pas le truc le plus racoleur peut importe la qualité, pour que quoi qu'il se passe au moins qu'on en parle.

Dommage qu'on ne se servent pas de la technologie pour mettre en avant une vraie créativité, et la diffuser. Encore une fois, c'est à se demander si Mike Judge n'est pas le génie de ce siecle,l'émission "oh my balls" du film Idiocracy nous guette a tous les coins de rue.

Quoi qu'il en soit, le buzz est éphèmere contraiement à la vraie création donc Susan Boyle peut passer faire un concert à Paris si elle veut, mais une fois qu'elle aura chanté les Misérables, personne n'en aura rien à faire de la suite, et demain, les misérables on l'aura assez entendu. Direct aux oubliettes. On a besoin d'artistes "vrais", de ceux qui fédèrent les fans qui vont suivre sur la longueur, ceux qui proposent quelque chose de crédible, et ce n'est pas le buzz qui fait ça mais la qualité. Pareil pour les produits, pareil pour les films, si ça ne vaut rien on pourra toujours essayer de faire le maximum de bruit, le bouche à oreille sera toujours plus fort pour démonter le buzz, tout du moins si les gens se focalisent un peu sur le contenu plutôt que le contenant..

Donc avant de vouloir à tout prix filmer au camescope un type qui traverse la rue à poil, sur les mains avec un nez de clown pour votre prochain clip, demandez vous déjà si le produit ou la musique que vous défendez est prêt à être exposé.